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Les produits chimiques ne font pas bon ménage

« Je n’utilise plus que des gants bien épais car les gants de chirurgiens, vous les trempez deux fois dans des produits classiques et ça devient du chewing-gum. Je n’imagine même pas ce que ça peut faire sur les mains ! » Elisabeth est technicienne de surface dans le Gers. La plupart du temps, elle travaille à domicile et utilise les produits ménagers des particuliers. « Certains produits chimiques me font tousser comme une tordue, déclare-t-elle sans mâcher ses mots. Quand je vois que certains vaporisent des insecticides ultra forts sur leur matelas par exemple, je ne m’y coucherais pas moi-même ! » Pour qu’une professionnelle de la propreté fasse cette déclaration, on imagine que les raisons sont nombreuses... Mains sèches, la peau qui s’effrite, eczéma, toux, maux de tête, etc.  La liste des effets néfastes sur la santé des produits d’entretien chimiques est longue (voir encadré).

 

Par le seul fait de manipuler des produits d’entretien toxiques dans leurs tâches ménagères, les femmes au foyer auraient 55% plus de risques de succomber d’un cancer que celles ayant une activité professionnelle. Une étude publiée en 2010 a même montré que les risques de développer un cancer du sein étaient multipliés par deux.

 

Un compromis politico-industriel

Dans le milieu du travail aussi, les effets se font ressentir. « Deux de nos agents ont récemment déclaré des réactions allergiques ou des toux en réaction à certains produits », déclare Perrine Spadoni, chef d’exploitation d’une société de nettoyage industriel et service dans le Sud-Ouest, suivie par une responsable de secteur d’une société d’aides à domicile à Auch : « Une collègue avait les mains bien rouges, irritées et asséchées. Sans parler de l’odeur de javel qui vous reste dans le nez et qui provoque des maux de tête.»

 

En 2013, le gouvernement français a enclenché une procédure de prohibition du perchloréthylène, utilisé principalement dans les pressings, car reconnu cancérogène.

 

« Aucun produit chimique n’est inoffensif », précise une brochure du ministère du travail qui « classe les produits dangereux en fonction des connaissances scientifiques et médicales acquises », en constante évolution. Sur cette même brochure, il est spécifié que certains produits aujourd’hui reconnus nocifs comme les éthers de glycol, qui comptent parmi les solvants les plus dangereux, ou certains solvants comme le thrichloréthane sont bannis des rayons du commerce, interdits à la vente pour les particuliers. En revanche, ils sont réservés pour une utilisation professionnelle. « Un compromis politico-industriel au niveau européen », n’hésite pas à déclarer le ministère. En effet, plutôt qu’interdire ces substances, elles sont « laissées à l’appréciation et à l’évaluation des risques à la charge de l’employeur ».

Pesticides, émissions de carbone, ozone, etc. Notre air extérieur est pollué, nous le savons depuis longtemps. Il suffit parfois de rentrer chez soi pour se sentir en sécurité. Mais qui aurait cru que l’air intérieur de nos maisons était aussi dangereux pour la santé ?

Les liquides vaisselle : 

Les détergents composés d’agents nettoyants nocifs enlèvent la protection naturelle de la peau en agissant sur elle de la même manière que sur la vaisselle, provoquant crevasses, dessèchements et allergies.


Détergent pour lave-vaisselle :

Contient une grande quantité de phosphates qui rendent soluble la graisse ou l’huile permettant de mettre les saletés en suspension. Ces détergents peuvent provoquer des brûlures en cas de contact avec les yeux ou la peau.


Lave-vitre :

Ces produits contiennent essentiellement de l'ammoniaque à l'origine d'irritations des voies respiratoires.


Lave-sol :

Le plus souvent toxiques, ces produits entraînent des irritations cutanées et des allergies respiratoires.


L’eau de javel :

Contrairement aux idées reçues, l’eau de javel n’est pas un détergent. Elle décolore et désinfecte, mais ne nettoie pas. Une utilisation trop longue peut causer des maux de tête, des nausées et des brûlures aux yeux et à la peau.


Débouche-canalisations :

Les acides forts peuvent provoquer des brûlures du deuxième voire troisième degré.


WC :

Les produits en bloc ont des conséquences néfastes sur le foie et les reins. Les gels, composés de détergents, d'acides et de parfums pour tuer les bactéries, engendrent brûlures et irritations.

Santé

Quelques exemples

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Un manque d’information

« Quand leurs produits ne me conviennent vraiment pas, je le signale et essaie de sensibiliser les particuliers aux alternatives simples comme le vinaigre blanc, les huiles essentielles, le citron, confie Elisabeth. Mais tous ne sont pas prêts à changer leurs habitudes. » Perrine Spadoni le confirme : « Seuls 5% des clients à qui l’on propose une gamme de produits écologiques, les demandent. Ce n’est pas trop leur souci. »


Selon un rapport du ministère du travail, les utilisateurs de produits chimiques, qu’ils soient employeurs, salariés ou simples intervenants dans les entreprises, « sous-estiment bien souvent, lorsqu’ils ne l’ignorent pas, la dangerosité des produits chimiques manipulés et les risques auxquels ils sont exposés. Les conséquences sur la santé sont de degrés très variables, pouvant aller de l’incapacité temporaire à la mort, en passant pas l’inaptitude au poste de travail ou la mise en invalidité. Elles peuvent être soudaines (brûlures, asphyxie), brutales (intoxications aiguë, incendie, explosion) prendre la forme  de maladies ou d’intoxications chroniques. Elles peuvent survenir progressivement ou apparaître plusieurs années après l’exposition, alors que la victime a changé de profession ou est à la retraite. » Le problème vient peut-être d’un manque d’informations... Il apparait que, selon un étude réalisée en 2014 par Eurobaromètre, la France est l’un des pays d’Europe les moins informés : 56% des personnes interrogées déclarent connaître peu ou pas l’impact environnemental et sanitaire des produits qu’ils consomment. Et seuls 7% des Français disent en savoir beaucoup, ce qui est la plus faible valeur observée parmi les pays de l’Union européenne.


La mise en place en 2015 de nouveaux pictogrammes peut aider le consommateur à y voir plus clair sur la toxicité des produits proposés en rayon mais rares sont les études publiées sur la composition exacte des produits commercialisés en France ou en Europe. En 2005, 4,8 millions de substances cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction ont été utilisées en France. Un chiffre rendu public qui ne fait pourtant pas reculer les industriels.